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Catégorie : Le monde associatif
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Les éclaireuses sont ces abeilles expérimentées qui parcourent l’espace alentour à la recherche d’une cache dans laquelle l’essaim au bivouac pourra s’installer et hiverner. Chacune revient éventuellement en compétition avec les autres raconter sur le dos de l’essaim le fruit de son exploration. C’est avec toute la force de leur conviction qu’elles s’affrontent ainsi. Celles qui sont rentrées bredouilles ou qui n’ont découvert que de médiocres sites repartent visiter les découvertes de leurs congénères et reviennent participer aux débats. Le processus se déroule jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une proposition en lice. Il s’avère que cette dernière est quasi systématiquement le meilleur choix possible.
L’enjeu, la survie de l’essaim, est donc soumis à un processus démocratique par délégation. Le débat, public et ouvert, fonctionne de manière si efficiente en raison de la loyauté absolue des participants (l’abeille n’a pas d’Ego à dorloter, elle œuvre entièrement pour le bien commun) et de la compétence des éclaireuses.
Pour les humains, il s’agit de participer aux affaires nous concernant tous ( les res publica ).
Cette loyauté, les Romains la nommaient fides (la bonne foi) et la considéraient comme l’attribut essentiel fondant la citoyenneté.
Montesquieu faisait appel à une notion moins précise, la vertu. L’idée reste la même. L’homme, animal déprogrammé, est soucieux de son image, généralement travaillé par son ego, corruptible. Le débat démocratique lui est donc moins accessible qu’à l’abeille.
S’il n’était pas excessivement compliqué au citoyen de Rome ou d’Athènes de participer aux affaires de la cité, la société contemporaine est d’une telle complexité ( technique et administrative) qu’il n’est de compétence que très partielle, par spécialisation. Et si les élus font souvent appel à des experts, ils choisissent généralement ceux-ci en fonction d’une proximité idéologique plutôt que de rechercher la confrontation de leurs avis (qui impliquerait leur étude comparative, labeur économisable). Face à cela, le citoyen est fort démuni.
Le profil de l’élu, homme de pouvoir, possède un ego qui fera tout pour disposer de la plus grande liberté de manœuvre possible, pour échapper aux contrôles que doivent exercer les citoyens. La seule possibilité de faire exister des contre pouvoirs permanents aptes à équilibrer le pouvoir des élus est de participer à des associations, cadres dans lesquels des compétences complémentaires peuvent être rassemblées autour de thèmes ou d’objets spécifiques pouvant seules apporter compréhension et capacité à critiquer, voire contester les actions de nos représentants.
La force de ces associations réside dans la qualité de leur travail. Encore faut-il que les administrés désireux d’exercer leur citoyenneté participent à de telles associations. Ce n’est pas voter pour des inconnus (avec qui on ne vit pas) dont on ignore par la suite ce qu’ils ont accompli et dans quelles conditions (juger de cela exige par ailleurs des compétences) qui constitue un état de démocratie (républicaine ou non). Travailler, consommer et se distraire ne fait pas le citoyen.
Cela constitue la raison de l’existence d’associations comme CELIA.
  Bernard V.